Il y a un an, l’éco-blog interviewait Delphine Smagghe, directrice marketing et développement durable pour Mc Donald’s France (lire l’interview). L’action du groupe était alors cotée en bourse à 67,77 $. 365 jours se sont écoulés, l’action atteint désormais les 82,60 $, et nous avons proposé à Delphine une contre-interview pour faire le point sur les actions engagées (non pas financières mais environnementales), les évolutions quant aux projets déjà en place, et les freins rencontrés.
[NDR : Avant de commencer cette interview, je tiens à préciser que l’éco-blog a été créé pour ouvrir le dialogue quant aux défis du 21ème siècle avec la volonté de faire évoluer les choses positivement. C’est donc sans à priori, mais avec un certain nombre d’interrogations relatives au développement durable et à la communication responsable que nous abordons cet entretien. Nous vous invitons donc à poser vos questions dans un esprit constructif.]
Bonjour Delphine. Cette année fut-elle un bon cru pour Mc Donald’s en matière de développement durable ?
Cette année a été l’année du développement durable ! Nous avions jusqu’à présent traité de façon distincte chacun des domaines du DD : économique, social et environnemental. Il s’agit, maintenant que nous avons progressé sur de nombreux sujets, de construire une véritable politique intégrée de développement durable, en travaillant sur l’articulation de ces thématiques. Nous nous associons d’ailleurs à un travail de recherche dont l’objectif est la construction d’un ensemble d’indicateurs permettant de rendre compte avec exactitude des relations entre l’entreprise et la société.
Quels ont été les faits marquants, tes joies, et peut-être aussi tes déceptions ?
En matière d’environnement, beaucoup de projets initiés il y a plusieurs années portent aujourd’hui leurs fruits. Par exemple, notre plan agroécologique est opérationnel depuis octobre 2010 sur nos cinq principales filières d’approvisionnement, pour réduire de façon significative les impacts environnementaux liés à nos productions agricoles. Il vient maintenant renforcer le plan énergie en restaurant et le plan déchets, ainsi que toutes les autres actions que nous menons transversalement (eau, choix des matériaux…).
Et nous avons réalisé notre troisième Bilan Carbone, avec des résultats très encourageants.
Mes déceptions ? Pas de déception particulière mais plutôt le souhait d’avancer plus vite dans certains projets …. Certains sont plus complexes et plus longs (la mise en place du tri sélectif par exemple) que d’autres à mettre en œuvre bien sûr, mais les résultats obtenus au fil des années nous encouragent à persévérer.
Les objectifs annoncés par Mc Donald’s en 2009 en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre pourront-ils être atteints (60 % en restaurant et 20 % pour le périmètre global – voir la tribune) ?
Ces objectifs ont été fixés pour 2020. Nous avons bon espoir de les atteindre au vu des résultats du troisième Bilan Carbone que nous venons de réaliser à partir des données 2010. Ils sont très encourageants : nous avons réduit nos émissions de 35% par repas servi sur le périmètre de nos restaurants. Nos émissions « globales », comprenant les émissions liées à l’agriculture/élevage et aux déplacements de nos clients, ont diminué de 2%. Ce dernier chiffre est très important puisque nous avons réussi pour la première fois à réduire nos émissions sur notre périmètre de responsabilité le plus large, malgré la croissance de nos activités. Nous analysons en effet les résultats sur deux périmètres : notre périmètre d’activité principal (les restaurants) et notre périmètre global qui intègre notamment les filières d’approvisionnements agricoles. Ces dernières représentent une part très importante de nos émissions de GES. La réduction de ses émissions est l’un des objectifs poursuivis par notre stratégie agroécologique.
Donc oui, nous sommes en bonne voie pour atteindre nos objectifs 2020.
QUID de l’énergie (électricité) consommée dans les restaurants de la chaîne ?
Par définition, l’énergie la moins polluante est celle qui n’est pas consommée. C’est sur ce constat que nous avons bâti notre plan énergie, dans cet ordre de priorité : commencer par réduire nos consommations, accroître l’efficacité énergétique de nos équipements et des bâtiments, produire de l’énergie localement et faire le choix des énergies renouvelables via l’achat de certificats verts pour couvrir l’ensemble des consommations électriques de nos restaurants (cette dernière action est en place depuis janvier 2010). Et chaque année, nous travaillons à progresser sur le sujet.
Le tri sélectif dans les restaurants gagne t-il du terrain sachant que 25% des déchets pourraient déjà être triés (bouteilles en plastique et cannettes) ?
Quand on parle de tri sélectif en restaurant, il faut distinguer le côté cuisine et le côté clients. Côté cuisine, nous nous sommes engagés dans la collecte et la valorisation de deux types de déchets qui représentent des tonnages très importants : les huiles de friture usagées (transformées en biodiesel depuis 2004) et les cartons (recyclés en filière papèterie depuis 2001). Côté client le problème le plus complexe à résoudre est celui de la collecte. Nos restaurants sont répartis sur tout le territoire, si nous mettions sur la route des camions pour aller chercher quelques kilos de déchets çà et là, le bilan environnemental global serait négatif ! Une des solutions suppose de travailler en partenariat étroit avec les communes pour réorganiser les circuits de collecte en intégrant les déchets des restaurants à ceux des ménages. C’est possible et déjà réalisé pour une centaine de restaurants qui proposent le tri sélectif « côté client » et dont les déchets sont collectés et valorisés en même temps que les déchets ménagers. Et ça fonctionne très bien. Mais nous savons que cette solution ne pourra pas être adoptée partout. Nous étudions donc parallèlement un autre scenario, qui passe par des prestataires privés.
Y-a t-il des pistes pour les 75% de déchets restants ?
La piste évidente serait celle de la méthanisation. Ce procédé nous permettrait de valoriser les déchets d’emballages papier/carton souillés qui représentent une part importante de nos déchets coté clients. Mais les unités de méthanisation capables d’accueillir nos déchets sont encore peu nombreuses sur le territoire français.
Quelle est la nature du plan de soutien aux pratiques agricoles vertueuses annoncé par Mc Donald’s, s’agit-il de privilégier les productions locales et bio par exemple ?
Notre plan agroécologique repose sur la mise en place d’un réseau de fermes de référence sur nos filières blé, bœuf, pomme de terre, poulet et salade, pour développer des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement. Certaines s’inspirent de l’agriculture biologique, d’autres utilisent des techniques de pointe, mais toutes vont dans le sens d’une gestion raisonnée des intrants, de l’eau, de l’énergie… Sur chaque ferme, des agriculteurs volontaires testent de nouvelles pratiques innovantes qui répondent à 4 objectifs : diminuer les émissions de GES, préserver les ressources en eau, contribuer au maintien de la biodiversité, respecter le bien-être animal. Les expérimentations sont suivies grâce à des indicateurs agroenvironnementaux. Les pratiques qui auront fait leurs preuves seront déployées pour vérification dans un premier cercle de fermes ou d’élevages. Ensuite, la technique sera étendue à tous les bassins de production, avec les adaptations nécessaires aux situations territoriales et climatiques spécifiques.
L’appel à projets environnementaux lancé par Mc Donald’s est-il prometteur ?
Les travaux menés dans le cadre de l’appel à projets sont toujours très intéressants. Ce regard extérieur que peuvent nous apporter les écoles et les enseignants est souvent très précieux parce qu’il amène des idées nouvelles que nous essayons justement d’adapter à notre activité. Nous avons par exemple conclu un partenariat avec l’école d’ingénieurs de Purpan, lauréate 2009, pour des études dur la réduction des GES émis par les élevages bovins. Sans les conclusions de l’UTT (Université Technologique de Troyes) sur la méthanisation, nous ne serions pas engagés aujourd’hui dans des projets de méthanisation sur le territoire. La sélection 2011 couvre des sujets très variés : l’empreinte Eau des restaurants (Imperial College of London), les déplacements des clients et des collaborateurs (Université Catholique de Lille), et la biodiversité dans la filière agricole Blé (AgroParisTech).
Est-ce que Mc Donald’s a songé à un système de récupération des eaux de pluie globalisé, pour l’ensemble des restaurants quant ils disposent d’une toiture ?
Tous les équipements des restaurants sont référencés dans un catalogue pour que les franchisés puissent choisir les solutions les mieux adaptées à leur situation. Nos ingénieurs construction présents en région les accompagnent dans la réalisation de leur projet. Les récupérateurs d’eau de pluie figurent dans ce catalogue, leur installation reste une démarche volontaire à mener lorsque la région climatique le permet ! Les premières installations sont concluantes avec près de 250 m3 d’eau économisés par an. Certains optent pour ce type d’équipement, d’autres préfèrent investir dans les systèmes d’urinoirs sans eau qui permettent, eux aussi, de réduire la consommation d’eau d’environ 150 m3 d’eau par an et par restaurant équipé.
Quels sont les objectifs environnementaux fixés par Mc Donald’s pour les prochains mois ?
Nous poursuivons notre stratégie environnementale : sur la question agricole, nous commencerons à faire certains choix sur les pratiques testées (celles qu’on poursuit, celles qu’on laisse de côté, celles qu’on rajoute…). Dans les restaurants nous poursuivrons le déploiement des installations de pompes à chaleur, des systèmes plus efficaces sur le plan énergétique.
Une nouvelle version d’EcoProgress, notre logiciel qui permet à chaque restaurant de piloter sa démarche environnementale verra le jour. Cette nouvelle version permettra aux restaurants de suivre encore plus précisément et plus facilement leurs indicateurs environnementaux (consommations d’énergie et d’eau, émissions de GES, déchets….)
Nous poursuivons également le déploiement de notre Plan Emballages Abandonnés qui vise à réduire la quantité d’emballages retrouvés sur la voie publique, en partenariat avec les collectivités locales. A ce jour, 880 communes se sont engagées à nos côtés.
Comment évolue le service développement durable de Mc Donald’s… de nouvelles têtes, des nouveautés dans le fonctionnement ?
La question est un peu prématurée, dans la mesure où cette année est le « temps zéro » de notre politique DD. Il faut nous faut d’abord faire un état des lieux, construire la stratégie…. Une évolution pourrait être possible dans les années à venir, mais c’est un peu tôt pour le dire !
Dans ma précédente interview, tu avais habillement évité ma question concernant le budget du département Environnement de Mc Donald’s. Ne serait-il pas intéressant cette année de communiquer ce chiffre afin de gagner en transparence ?
Il ne s’agit pas de manque de transparence mais d’une difficulté à consolider l’ensemble des coûts pour la mise en œuvre de notre démarche environnementale. Le département Environnement a un budget de fonctionnement auquel il faut ajouter l’ensemble des investissements faits par l’enseigne mais aussi les investissements locaux réalisés par nos franchisés, ainsi que les budgets en temps Homme liés au pilotage de notre démarche via les référents EcoProgress et ceux liés à la communication/sensibilisation sur le sujet… Même question, même réponse : tenter de communiquer un chiffre ne refléterait pas l’investissement global dans la démarche.
Selon le Financial Times, McDonald’s Europe va partiellement remplacer les caissiers par des machines, peux-tu nous en dire plus à ce sujet ?
Aujourd’hui, il existe des bornes interactives de prise de commande dans de nombreux restaurants. Elles permettent au client de gagner du temps et de régler directement son achat sur la machine. Les équipiers sont informés de la commande, la préparent en cuisine et la servent au client lorsqu’elle est prête. Il s’agit là d’un service de commande complémentaire, offert aux clients pressés et il n’est aucunement question de le substituer aux caisses classiques qui restent d’actualité.
Les Inrocks ont annoncé la faim fin de Ronald… rumeur démentie par Mc Donald’s. Ce « fait divers » est la conséquence d’une action engagée par un collectif de médecins américains qui annoncent que « dans les prochaines décennies, un enfant sur trois développera un diabète en raison d’une alimentation essentiellement de junk-food, à l’image de ce que propose McDonald’s ». Cette déclaration est-elle fondée ?
Je répondrai à cette question en donnant quelques éclairages. L’augmentation de l’obésité est un problème dont l’origine est complexe et multifactorielle, liée non seulement à l’alimentation, mais aussi au mode de vie (grignotage, manque d’activité physique, etc.). Par ailleurs, il faut rappeler que l’étendue de notre gamme de produits permet à chacun de composer un menu adapté à tous les besoins nutritionnels. Nous proposons une gamme de produits variés (salades, fruits, …) et mettons à disposition une information nutritionnelle simple sur nos produits. Précisons aussi que 63 % des menus pour enfants ne dépassent pas les besoins énergétiques moyens pour le repas d’un enfant de 6 ans.
Blog, nouvelles technologies, street marketing, comment naissent ces idées… quelle latitude (ou contraintes) as-tu dans ton travail chez Mc Donald’s, et comment veilles-tu à ne pas aller trop loin dans le mélange marketing/écologie ?
Au sein de McDonald’s France, l’ambition environnementale est avant tout axée sur les actions concrètes, ce qui peut expliquer que nous ayons encore peu communiqué sur notre démarche environnementale.
Le mélange marketing/écologie, s’il porte sur un engagement concret et sincère de la part de l’entreprise, peut tout à fait être envisagé. Le journal Développement Durable de Mcdonald’s France, le blog en sont de bons exemples.
Comment est-ce que le blog Mc Donald’s Environnement évolue t-il ?
Le blog est fréquenté régulièrement et reste un lieu d’échanges intéressants avec nos clients notamment. Beaucoup de commentaires sont très positifs, cela conforte nos choix et nous encourage à continuer de progresser. Le blog remplit son rôle en établissant un lien direct avec les internautes sur les questions de l’environnement. Il s’ouvrira probablement à l’ensemble des thématiques sur le Développement Durable d’ici quelques mois….
As-tu d’autres aspirations personnelles au sein du groupe Mc Donald’s (volonté d’évolution, envie de découvrir d’autres domaines…) ?
Mes nouvelles responsabilités en termes de développement durable m’entraînent à découvrir de nouveaux domaines et c’est très enrichissant.
As-tu un message à faire passer à nos lecteurs ?
J’invite tous les lecteurs à consulter notre rapport de développement durable pour découvrir les différents projets que nous avons engagés et que nous voulons engager dans les années qui viennent.
J’invite bien sûr tous les lecteurs à venir visiter mon blog pour échanger et discuter ensemble.
Merci Delphinne.
En complément, vous pouvez découvrir le journal du développement durable de Mc Donald’s France 2011.
Merci à vous pour cette interview très instructive, c’est bien de voir que les mentalités évoluent !
Je pense que ce qu’il faut aussi souligner, c’est que le client a beaucoup à faire également, c’est ensemble qu’on peut faire évoluer les choses !
je vais de temps en temps au macdo avec mon loulou surtout pour les jeux et tobbogans interieur ou exterieur et la petite surprise pour un prix imbattable …bien la boisson bio , la compote …
par contre souvent les tomates cerises sont « passées » et il parvient des cuisines une de ces odeurs ! (qu’on ne sent pas chez les autres fast food) je plainds surtout employés pour ça ….
si non il était question que macdo mettait en appétant qui rendait accro dans ses burgers ….je ne sais pas si c’est toujours d’actualité , en tout cas le burger de quick n’a pas le même goût …
merci pour cette interwiew 🙂
désolée pour les fautes, je ‘arrive même pas à me relire , j’ai taper trop vite arggg
article intéressant
je suis surpris tout de même que le sujet de la consommation de viande rouge ne soit pas abordé
la (sur)production de viande rouge est négative pour le climat et pour notre santé
et les fast food comme mac do contribuent tres largement à inciter le public dès le plus jeune âge à (sur)consommer de la viande rouge …
A quand les burgers végétariens chez mac do ? des menus végétariens qui donneraient envie au public d’aller au mac do sans systématiquement manger de la viande rouge ….
@d’halluin stephane,
cette question a été soulevée lors de la première interview dispo ici : http://www.eco-blog.fr/2010/06/mc-donalds-environnement-delphine-smagghe/
Mais je t’invite à questionner Delphine sur son blog pour lui faire part de ta remarque intéressante.