En cherchant des références pour écrire mon prochain billet, je suis tombé sur un texte de Pierre-Coury (surnommé Le Grizzly), un blogueur qui partage sa vision de la société [ndr : convictions qui n’engagent que lui – l’éco-blog n’ayant pas d’étiquette].
Cet article m’a touché par sa sincérité et sa spontanéité. En fait, c’est un texte que j’aurais pu écrire moi-même. Proposer une re-publication de ce billet à son auteur en guest blogging s’est naturellement imposé. L’éco-blog vous livre donc cet article touchant, avec l’accord de son auteur.
Les glaneurs, l’affouage et les poubelleux
Après le coucher et avant le lever du soleil, une fois la moisson faite, ces deux conditions étaient réunies pour que les glaneuses ramassent ce qui restait.
Aujourd’hui, l’affouage, lui aussi, est encore possible avec l’accord du conseil municipal. Détail : la loi précise toujours que les trois citoyens de la ville les plus solvables sont responsables financièrement des dégâts éventuels causés par les affouagistes, par solidarité.
(Aparté : qu’est-ce que j’aimerais aller faire le couillon dans les bois, juste pour savoir qui sont nos 3 gros solvables !)
Les glaneurs existent toujours : ils font les poubelles et les conteneurs des supermarchés : pain, salades, poireaux, poisson : le sac d’oignons parce qu’il y a UN oignon pourri dedans; cagettes d’oranges ou de pommes, trop longues à trier; pack de yaourts parce que UN est ouvert; et bien d’autres produits dont la date limite arrive à échéance, ou est dépassée.
Les fast-foods jettent aussi des tomates tranchées, du fromage et du pain.
Certains supermarchés mettent de l’essence ou de l’eau de javel sur les produits jetés : ils craignent une intoxication qui pourrait nuire à leur image de marque, voire un procès, ou se réfugient derrière la loi qui leur interdit de transporter des marchandises périmées. Un peu trop faciles ces excuses !
A la fin des marchés, les commerçants beaucoup plus intelligents, au moment du remballage, mettent de côté fruits et légumes abîmés. Connivence qui arrange tout le monde.
Quand j’étais restaurateur, il m’était interdit de donner des aliments. Il suffisait d’avoir une porte discrète sur le côté et la plupart de mes collègues faisait de même. Car voir quelqu’un en toute fin de soirée mendier non pas une pièce pour aller picoler mais l’entendre dire « est-ce que vous avez quelque chose à manger » est le reflet de quelque chose qui ne va pas dans notre pays, 5ème puissance économique mondiale !
Par contre, la grande distribution est très prolixe dans ses pubs pour les dons aux associations, ou lorsqu’elle est partenaire : banque alimentaire, Restos du Cœur, Secours Populaire par exemple. Je vais encore grogner mais quand je prends le sac plastique donné par la Croix-Rouge ou autres, que je leur remets plein en sortant avec ce qu’il est conseillé d’acheter, c’est bien le supermarché qui a encaissé. Et il doit être bien content du chiffre d’affaire réalisé pendant ces deux jours de « notre » solidarité !
Alors au lieu de jeter, voire d’abîmer pour certains, on devrait leur imposer d’organiser la récupération des produits pour » les pauvres, malheureux et gens défavorisés » (selon la terminologie de la loi des glaneurs et des affouages). Les poubelleux doivent avoir les mêmes droits que les glaneurs et les affouagistes.
Texte original de Pierre Coury