Fukushima, 5 ans après.

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Le 11 mars 2011 un tsunami frappait le Nord Est du Japon à la suite d’un séisme de magnitude 9, ce qui entraînait un accident nucléaire de niveau 7 dans la centrale de Fukushima. Une catastrophe aussi grave que celle de Tchernobyl en 1986. Le monde moderne tremblait sur ses bases, le nucléaire redevenait une menace réelle. Cinq ans plus tard, la leçon n’a pas porté.


Dans ce contexte anniversaire il est bon de rappeler que les conséquences de Tchernobyl ne sont toujours pas entièrement connues. C’est le constat d’un rapport exhaustif tout juste publié par Greenpeace (1). On y apprend entre autre que les radiations sont toujours présentes dans les zones contaminées d’Ukraine, de Biélorussie et de Russie. « Elle est dans ce que les habitants de ces zones mangent et dans ce qu’ils boivent. Dans le bois de construction, dans le bois de chauffage et dans les cendres qu’ils utilisent pour fertiliser leurs terres. Et comme cette contamination les suivra pendant encore des décennies, elle impactera d’autant leur santé ». Des enfants nés des décennies après la catastrophe sont toujours soumis au danger nucléaire. Mais la situation géopolitique n’aide probablement pas à faire toute la lumière sur les conséquences de la catastrophe, ni à assurer la coopération des différents pays touchés.

5 ans après : où en est le Japon ?

Au moment de la catastrophe, une large zone de 20km autour de la centrale est rapidement évacuée car contaminée au Césium 134 et 137, hyperactif pendant au moins trente ans.

Pourtant les habitants de cette zone toujours contaminée seront dès 2017 incités à réinvestir la zone interdite, poussés à « fabriquer de la résilience » selon les termes du géographe Rémi Scoccimarro et à quitter les préfabriqués où ils étaient contraints de vivre. TEPCO, la compagnie privée qui gère la centrale verse pour l’instant des allocations mensuelles aux déplacés. Elle cessera ces versements en 2018. Selon les autorités, plus de 3000 de ces rescapés sont morts des suites des violentes conséquences psychologiques de la catastrophe et du déplacement.

En 2012, TEPCO annonçait que la catastrophe aurait un coût de 100 milliards d’euros, dédommagement des populations et décontamination de la zone compris.

La décontamination : est-ce que ça marche ?

Actuellement le mode de décontamination consiste à gratter et à nettoyer les surfaces au karcher puis à enlever la terre autour des habitations sur 5cm d’épaisseur. Des experts estiment quant à eux que ce sont les revêtements des routes, les trottoirs, les toitures et tous les éléments recouverts de peinture qu’il faudrait enlever. Mais même dans ces conditions, où mettre ces tonnes de terre et de matériaux contaminés ?

Autour de la centrale de Fukushima, on a créé une zone remplie de déchêts radioactifs d’une superficie de 16km2. Pire, en 2015 on a stocké 9,16 million de sacs d’1m3 contenant des matériaux contaminés dans la préfecture, notamment dans les rues de la ville de Fukushima qui se trouve en réalité à plus de 50km de la centrale Fukushima Dai-ichi. Ces sacs ont une solidité garantie de 3 ans…

La réalité de la décontamination c’est qu’elle consiste non pas à éliminer la contamination mais à déplacer le problème. Selon Greenpeace, non seulement les procédures de décontamination menées par les autorités japonaises sont insuffisantes et inefficaces, mais elles sont susceptibles d’entraîner des re-contaminations.

Pour les chercheurs interrogés par l’ONG, les populations qui retourneront dans leurs lieux de vie d’avant la catastrophe d’ici deux ans seront soumis à des taux de radiation inacceptables. De fait, les taux acceptables pour les populations civiles étaient auparavant fixés à 1 mSv par an. Après la catastrophe, le gouvernement japonais les a fixés à 20 mSv par an, soit les taux habituellement autorisés pour les seuls travailleurs du nucléaire. Seules les zones où la radiation subie serait de 50 mSv par an seront exclues de cette politique de retour à la normale, c’est à dire de retour dans des foyers… contaminés.

Dans les forêts où aucune opération de décontamination n’a eu lieu, il semblerait que la radioactivité ait baissé de plus de 50% en raison de la dégradation naturelle du césium-134, dont la demi-vie est de deux ans. Mais il reste que la moitié de la contamination est due au césium-137 qui persistera des décennies et devrait continuer à contaminer l’environnement au travers du fonctionnement naturel de l’écosystème.

Et dans le monde ?

– Dès avril 2011, l’Allemagne a planifié la fermeture de ses centrales pour 2022.

– L’Italie a suivi en renonçant définitivement au nucléaire dont le retour avait pourtant été reprogrammé sous Berlusconi.

Pourtant, le Japon n’a pas l’intention de sortir du nucléaire avant… 2040. « Le Japon ne peut se passer du nucléaire » annonçait le premier ministre japonais ce jeudi 10 mars, à la veille de l’anniversaire de la catastrophe. Pour éviter un nouvel accident lié à un éventuel tsunami, l’état japonais construit des digues géantes, censées mieux résister que celles que le tsunami a balayées comme des châteaux de cartes.

– Les Pays-Bas ne comptent pas passer aux énergies renouvelables avant 2080.

– La Pologne se lance dans l’énergie nucléaire avec une première centrale prévue pour 2020.

– Le Royaume-Uni poursuit sa politique nucléaire et prévoit la construction de nouvelles centrales.

– La Suède prévoit quant à elle de moderniser et de remplacer ses réacteurs.

D’autre part, la mise en marche de réacteurs de troisième génération, dit à eau pressurisée ou EPR est prévue dans plusieurs pays : Finlande, Chine, États unis, Royaume-Uni et France avec l’EPR de Flamanville.

Mais un doute plane sur la construction et la mise en service de ces réacteurs nouvelle génération depuis que des fissures ont été découvertes sur les cuves de réacteurs prévus pour l’EPR de Flamanville. De plus l’autorité de sûreté nucléaire française a depuis 2013 fait état de fissures sur les cuves de 10 réacteurs français.

Coincidence ? La centrale de Fukushima avait été mise en service en 1971. Le Canton de Genève en Suisse vient de porter plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui et pollution de l’eau à propos de la centrale française du Bugey dans l’Ain, mise en service en 1972. Selon l’ASN, en cas de séisme certaines fonctions en lien avec le refroidissement du réacteur pourraient ne plus être assurés. C’est une des plus anciennes centrales françaises et elle se trouve à 70km de Genève.

Les suisses ne sont certainement pas les seuls à savoir qu’il ne sert à rien de construire des murs contre la radioactivité…

(1) Pour en savoir plus : Le rapport scientifique publié par Greenpeace le 9 mars 2016 sur les conséquences de Tchernobyl et de Fukushima.

Photo : IAEA imagebank. IAEA experts at fukushima. CC BY-SA 2.0

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Community Manager de l'imprimerie Villière (imprimerie écologique).

2 Comments

  1. Les centrales nucléaires m’ont toujours donné la chair de poule depuis la bombe nucléaire et les désastres qui ont frappés Tchernobyl et Fukushima… Cette énergie est efficace, mais il s’agit de la plus dangereuse, elle pourrait réduire la vie humaine et tout ce qui a été construit jusqu’à maintenant à 0. Je ne comprendrai jamais pourquoi nous n’arrêtons pas tout d’un coup dans le monde entier. On le sait tous : la terre est en danger. Cependant, on continue à vouloir profiter de notre petit confort en prenant le risque de tout détruire…

  2. Il sera difficile d’arrêter tout le nucléaire d’un coup. Dans l’état actuel du développement des énergies « propres », il faudrait recourir à des énergies encore plus polluante. Mais, une diminution programmée et imposée (organisée) par l’ONU serait probablement envisageable si les hommes les plus puissants sur notre planète n’étaient pas aussi les plus égoïstes et narcissiques…
    Le chanteur Pascal LAMBERT résume bien cela sur cette vidéo de la chanson « Tout va bien » : https://www.youtube.com/watch?v=6s6n8tOxfyk

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